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11 mars 2012 7 11 /03 /mars /2012 01:02

 DE MARIANNE+

 

Carte biométrique, vitale pour la fraude ou pour les entreprises privées?

 

Vendredi 9 Mars 2012 à 15:00 | Lu 4752 fois I 13 commentaire(s)

TEFY ADRIAMANANATEFY ANDRIAMANANA - MARIANNE Journaliste à Marianne, j'écris sur le numérique ainsi que sur les questions de police/justice... En savoir plus sur cet auteur

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Nicolas Sarkozy, à la suite de Marine Le Pen, vient de proposer la création d’une carte vitale biométrique. Hasard du calendrier, une loi vient d’être votée pour mettre en place une carte d’identité biométrique. Une aubaine pour les entreprises de ce secteur en pleine expansion. (Flickr- Remiforall - CC) Dans l’échelle du hochet sarkozyste, il y a le sans-papier qui égorge un mouton dans sa baignoire puis le musulman qui veut rendre le halal obligatoire à la cantine et enfin le fraudeur à l'assurance maladie, plus exactement l'assuré fraudeur et évidemment pas le médecin, électeur potentiel. Jeudi sur RMC, Nicolas Sarkozy a trouvé l’idée majeure pour lutter contre le fléau : créer une Carte Vitale biométrique. « Il nous impose de lutter contre la fraude, il nous impose de demander un effort aux Français comme aux étrangers qui en bénéficient », s’est-il justifié. En 2004, la réforme de l’assurance maladie prévoyait déjà la mise en place d’une Carte vitale biométrique avec les empreintes de l’assuré pour 2006. Raté. La mesure a fait son retour dans un rapport de la Mission d'évaluation et de contrôle de la Sécurité sociale (Mecss) de l'Assemblée nationale en juin 2011. Elle n’a jamais vu le jour en raison du coût du dispositif. Et cette idée a été récemment reprise par Marine Le Pen. La candidate FN brandit d’ailleurs souvent le chiffre de « 10 millions de fausses Cartes Vitale ». Mais ce chiffre qui vient d’un rapport de l’Igas datant de 2004 fait référence aux cartes en surnombre et non aux cartes falsifiées. En effet, une personne qui a du refaire une nouvelle carte n’est pas obligée de rendre l'ancienne. De plus, l’Igas a souligné dans son rapport qu’en matière de fraude, « les risques réels sont limités. Dans les faits, les cartes Vitale non récupérées sont rarement utilisées ». Et les montants de la fraude à l'assurance maladie des assurés sont minimes par rapport à celle des professionnels de santé : 2,5 millions d'euros en 2010, sur un niveau total de fraude de... 156 millions. UN MARCHÉ DE 9,4 MILLIARDS DE DOLLARS EN 2014 Peu importe, la biométrie, c’est le nouveau dada de Sarkozy. Hier, la proposition de loi créant la carte d’identité biométrique a été adoptée. La nouvelle carte contiendra notamment les empreintes de son détenteur. Un fichier national est aussi mis en place avec les empreintes de tous les propriétaires d’une carte biométrique, les services de police auront accès à ce fichier dans le cadre de leurs enquêtes. Mais l’argument sécuritaire est mis à mal par le fait que si la carte est censée être sécurisée, les documents permettant de l’obtenir ne le sont pas comme l’explique le journaliste Jean-Marc Manach. La justification se trouve donc ailleurs. Dans son rapport sur le texte, le député UMP Philippe Goujon, a été clair : « Les principales entreprises mondiales du secteur sont françaises, dont 3 des 5 leaders mondiaux des technologies de la carte à puce, emploient plusieurs dizaines de milliers de salariés très qualifiés et réalisent 90 % de leur chiffre d’affaires à l’exportation. Dans ce contexte, le choix de la France d’une carte nationale d’identité électronique serait un signal fort en faveur de notre industrie ». Le député Goujon avait également défendu plusieurs amendements favorables aux entreprises privées de sécurité dans le cadre de la Loppsi 2. Derrière la carte biométrique, il y a donc d’importants intérêts économiques en jeu. D’ailleurs, selon Owni, 14 représentants du Gixel, le lobby du secteur, ont été auditionnés au Sénat dans le cadre de cette proposition de loi.

 

PASSPORT

 

Le marché de la biométrie est en pleine expansion. Selon l'International Biometric Group, le marché mondial devrait passer de 3,4 milliards de dollars en 2009 à 9,4 milliards en 2014. SAFRAN N°1 MONDIAL Du même auteur Web campagne : le bug du buzz UMP Le mistigri Hadopi ou la sérénade de Hollande aux artistes Mémoire du Web : quand les candidats effacent leurs casseroles Parmi les principaux leaders français, il y a d'abord Morpho, filiale du groupe Safran et n°1 mondial. L’entreprise a remporté en 2010 un marché de 1,5 milliards de dollars pour collecter les empreintes digitales et scans de l’iris de l’œil de la population indienne. Manque de chance, le projet a été arrêté en décembre dernier. Il y a aussi Thalès qui revendique avoir délivré plus de 250 millions de titres d’identité dans plus de 25 pays. En 2008, l’entreprise a remporté le marché anglais pour la mise en place d’une carte d’identité biométrique. Re-manque de chance, en 2010, le nouveau gouvernement conservateur a annulé le projet au nom de la défense des libertés publiques. On peut aussi citer Gemalto, fabricant de la Carte vitale, ou ST Microelectronics. Le lancement de la carte d’identité biométrique devrait donc ravir le secteur. Un appel d’offres devrait être lancé fin mars. Un nouveau marché d'autant plus salutaire que l’industrie de la biométrie a déjà un contentieux avec la France. En octobre 2005, le ministère de l’Intérieur, dirigé par un certain Nicolas Sarkozy, décide d’attribuer la fabrication des nouveaux passeports électroniques à Oberthur, à l’époque poids lourd français du secteur. Le groupe a vendu en novembre dernier son activité cartes à puce au fonds américain Advent international pour 1,15 milliards d’euros. LOBBYS Le problème est qu’en France, c’est l’Imprimerie nationale, entreprise publique, qui a le monopole de la fabrication des pièces d’identité, elle peut en sous-traiter la conception de la puce au privé mais elle doit garder la mainmise sur le processus. Un principe fixé par une loi de 1993 signée par … Nicolas Sarkozy alors ministre du Budget. En avril 2006, le Conseil d’Etat annule le marché et Oberthur s'est retrouvé floué. Le ministère de l’Intérieur lui aurait alors versé 3,2 millions d’euros en guise de dédommagement (l’entreprise en demandait 11). Comme par hasard, en juillet de la même année, plusieurs députés UMP ont signé une proposition de loi mettant fin au monopole de l’Imprimerie nationale. Parmi ces députés, Pierre Méhaignerie, maire de Vitré… où se trouvait une usine de cartes à puces Oberthur, avant son rachat par Advent. La droite sait donc se soucier de sécurité. Enfin, de celle des actionnaires surtout.

 

TAGS : BIOMETRIE, FICHAGE, FRAUDE, SECURITE S'ABONNER À MARIANNE+ ACCUEIL

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